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Incident à Twenty-Mile

De Trevanian, aux éditions Gallmeiseter, 1998

Un véritable coup de cœur pour ce roman de Trevanian. L’auteur avoue une envie d’écrire un western avec un ensemble des personnages stéréotypés, mais comment les lier et en faire une véritable œuvre originale et forte. C’est le génie de Trevanian, cet écrivain autant mystérieux qu’inclassable. Outre le western et ses codes, Trevanian introduit d’autres dimensions qui font la toute la profondeur du texte, sa richesse et une fin que nul ne peut pressentir. Ce roman construit sur une montée en puissance de la terreur trouvera son point culminant dans le déchainement des hommes et des éléments.


Fin du XIXème siècle dans le Wyoming, la petite ville de Twenty-Mile vit les dernières heures de la ruée vers l’argent. Le filon semble s’épuiser, pourtant la compagnie minière et une quinzaine d’habitants dont quelques commerçants vivent encore des derniers bénéfices de cette exploitation. Or le destin de cette ville, presque fantôme, sera bouleversé par l’arrivée de Matthew, un jeune désœuvré et quelque temps plus tard, de trois tueurs recherchés dans tout l’État.


Roman implacable sur des vies toujours sur le fil. Trevanian décrit avec talent, tous les sentiments humains face au mal et à l’injustice, il en montre les faiblesses et parfois le courage pour lutter contre l’absurde. Après Shibumi, c’est le deuxième roman de Trevanian que je le lit et sûrement pas le dernier.


Trevanian Écrivain inclassable, échappant à toute catégorisation, Trevanian est autant une légende qu’un mystère. Un auteur sur lequel les rumeurs les plus incroyables ont circulé et qui a attisé la plus folle curiosité du monde littéraire. Un écrivain sans visage dont les livres se sont vendus à plus de cinq millions d’exemplaires et ont été traduits en près de quinze langues sans qu’il ait jamais fait de promotion.


Tout commence par la parution de La Sanction en 1972, succès planétaire qui sera adapté au cinéma trois ans plus tard par Clint Eastwood. Le film connaîtra le même retentissement que le livre, mais toujours aucune trace du romancier : le livre a été publié sous l'anonymat le plus complet et à aucun moment l'écrivain ne dissipe le mystère.


En 1979, pour le lancement de Shibumi, Trevanian accepte de donner une interview par téléphone et de lever un tant soit peu le voile sur ses inspirations et ses goûts littéraires - toujours sans révéler son identité. En 1983, il publie L'Été de Katya. À l’occasion de la parution de ce livre, qui tranche radicalement avec les précédents ouvrages, un article du Washington Post révèle qui se cache derrière Trevanian, et l’éditrice du Who’s Who in America renchérit : elle indique que le véritable auteur s’appelle Rodney Whitaker, qu’il est né au Japon en 1925, est titulaire d’un doctorat en communication et a été professeur à l’université du Texas.


Bien que l’auteur véritable ait été découvert, cela n’empêche pas le mythe de perdurer au rythme des parutions sporadiques de Trevanian. À la publication d'Incident à Twenty-Mile, en 1998, le créateur de cet étrange auteur, dont tout le monde semble vouloir nier l’existence, se livre enfin dans deux entretiens réalisés par fax. Et le jour où le monde découvre qui se cache derrière Trevanian se révèle un autre mystère : celui de son créateur, Rodney Whitaker. Un écrivain protéiforme et inclassable qui aura écrit des ouvrages sur le cinéma et d’autres romans et nouvelles, sous son propre nom, sous le pseudonyme de Trevanian, mais également sous ceux de Benat Le Cagot (le nom d’un personnage de Shibumi), Nicolas Seare, Edoard Moran ou Jean-Paul Morin.


Il révèle que tous les pseudonymes qu’il utilise sont d’abord des personnages qu’il a lui-même créés. Après avoir eu l’idée du livre, Whitaker invente l’auteur le mieux à même de raconter l’histoire, lui donnant la voix, le style, le passé, le milieu social, tout ce qui fait de lui le meilleur écrivain pour ce texte précis. La clé du mystère Trevanian est là : ce besoin éperdu de liberté dans la création littéraire, le refus d’être associé à un nom de plume - en particulier pour pouvoir aborder tous les genres, toutes les histoires possibles -, l'’écriture avant tout.


Au milieu des années 1970, après avoir quitté l’université du Texas, il devient professeur à l’université Bucknell, en Pennsylvanie, ainsi qu’au Emerson College, à Boston, avant de quitter définitivement les États-Unis et de partager son temps entre la France, dans un petit village basque du nom de Mauléon, et l’Angleterre, à Dinden, dans le Somerset. Il y passera le reste de sa vie avec sa femme, rencontrée à Paris, et ses quatre enfants. Il meurt en 2005.


Début du livre « Bien que cela fît maintenant huit ans que la Wyoming était devenu un Etat, les plus anciens des gardiens l’appelaient encore prison territoriale. Le gardien seconde classe John Tillman (surnommé « CB » par ses collègues qui raillaient ainsi la douceur de « Cul de Bébé » de ses joues) n’était titulaire que depuis un mois lorsqu’on lui confia la garde des « graines de lune » les fous criminels ; il n’avait jamais posé la question, de peur qu’il s’agisse encore d’une de ces blagues avec lesquelles les anciens gardiens tourmentaient et humiliaient les petits nouveaux. »


Extrait « - Oui, j’ai décidé de partir vers l’ouest et de faire fortune dans les ruées vers l’or et les filons d’argent, mais pas en prospectant. Mon vieux commis yankee m’avait un jour raconté comment des flots et des flots d’humains filaient vers l’ouest, pelle et pioche à l’épaule, des rêves d’or et d’argent plein la tête. « Cap à l’ouest, tout ! C’est là que tu feras ton magot, petit », me dit-il. En cherchant de l’or ? » je lui fais. « Sûrement pas ! En vendant des pelles et des pioches ! » »


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