📙 [Chronique] Les chevaliers du Tintamarre

De Raphaël Bardas, aux éditions Mnémos, 2022

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Voici un très bon roman de fantasy découvert sur le compte instagram de Pierre Raufast. Et fut un bon moment de lecture. Curieusement, parfois certains dialogues m’ont fait penser à des répliques d’une pièce de Molière. Les personnages sont truculents et les situations exagérées, mais c’est le propre de ces comédies. Raphaël Bardas plante un décor propice aux situations les plus incroyables. Mais nous assistons surtout à une enquête, d’autant plus difficile à résoudre que la magie est de la partie. De grands mystères apparaissent dans cette curieuse cité dont je ne peux vous livrer tous les secrets.

Nous retrouvons trois jeunes hommes qui vivent leur jeunesse dans les rues et les bouges de la cité de Morguepierre. Bagarreurs, artistes des coups de poings et experts en rinçage de gosiers, ils cherchent l’aventure pour continuer à vivre les plaisirs de leur âge. Pourtant, d’étranges événements vont se succéder dans ce port, d’horribles marie-morganes, êtres mi femmes mi poissons, sont retrouvées échouées sur la plage, et dans le même temps des jeunes filles disparaissent. Silas, Morue et Rossignol, assidus clients de la taverne du Tintamarre se retrouvent à enquêter.

Ce roman est aussi pour l’auteur le prétexte à parler d’amitié et de courage. Même à travers des personnages extrêmement différents des liens indéfectibles peuvent se nouer, jusqu’à risquer leur vie. Cette vie, les aventures et des épreuves les mènent à évoluer et à faire face. Raphaël Bordas a aussi un grand talent de dialoguiste, je l’ai déjà évoqué, et cela renforce l’idée de lire un beau roman et pas seulement de la fantasy divertissante. Une expérience à renouveler.

❓Est-ce que vos choix de livres sont aussi influencés par Instagram ?

Début du livre « MORGUEPIERRE

C’est là que nous avons grandi. La cité de la terre de l’océan, ronde et gonflée comme un gâteau de grand-mère et creuse en son centre comme quand on y fourre un doigt. »

Extrait « Il comptait alors sur les chevaliers du Tintamarre car, si saugrenue que soit cette idée, les bonhommes ne respectaient aucune limite et n’avaient aucun code si ce n’est leur propre vision de l’honneur. Bien que grossiers et mal éduqués, ils savaient se battre et connaissaient suffisamment la Vieille-Rade pour y retrouver un clou qu’ils y auraient égaré la veille. Et puis Valras avait cru en Silas Courtepeine. Rien ne saurait les arrêter. »

Extrait « Quand vint ce moment où la chair ne tolère plus que le bruit, des râles s’échappèrent de leurs gueules déformées par la rage primale. Entrecoupés de murmures, ils revenaient à l’assaut, incontrôlables, fracassant le silence de la nuit glacée. Sentant la fin venir, Silas fut rassuré de voir qu’Alessa s’y rendait aussi. Elle ne râlait plus, elle criait.

-          Au feu ! lança-t-elle avec une urgence qui flatta l’ego de Silas.

-          Oui, moi aussi, moi aussi je brûle !

-          Au feu, à l’incendie, hurla-t-elle de plus belle.

-          Yahaa ! Moi aussi, râla-t-il en terminant joyeusement son affaire.

-          Non, non, Silas, dit-elle enfin, essoufflée et en nage, baisant son front en sueur et lui saisissant le visage pour le forcer à voir. C’est la pêcherie, elle est en flammes. »

Extrait « Les choses qu’ils enjambèrent peu après achevèrent de les convaincre qu’ils étaient leurs propres psychopompes, faisant chemin de leur plein gré vers le grand dépôt des âmes. Au sol se trouvaient parfois des carcasses d’animaux, et d’hommes aussi, ou de moines cyclopes, ces étranges serviteurs muets qui nourrissent et protègent l’Ogre de Morguepierre. On approchait du but et le chemin se transformait peu à peu en antichambre du dépotoir. »