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📙 [Chronique] Les disparus de Pukatapu

De Patrice Guirao, aux éditions Pocket, 2020


Roman policier


🔥 🔥 🔥🔥


Suite des enquêtes de Lilith, la photographe et de Maema, la journaliste de la Dépêche de Papeete. Dans ce roman, les mythes, les croyances, les traditions, la violence et les expériences scientifiques se percutent sur une île perdue à plus d’un millier de kilomètres de Tahiti. L’isolement social, économique et culturel de cet îlot en fait un laboratoire de vie en communauté fermée, livrée aux éléments et à la manipulation. Pourtant, au premier abord, cette île a tout d’un paradis. Patrice Guirao maîtrise l’art de la narration qui va bien au-delà, d’une intrigue policière.

 

Une goélette vient d’emmener Lilith et Maema sur un îlot perdu du Pacifique en bordure de la Polynésie française. A part des contacts extrêmement limités avec le reste du monde, cela  a tout d’une vie rêvée. Elles ont rendez-vous avec un chercheur de l’IFREMER pour faire un reportage sur les conséquences du réchauffement climatique. Pourtant, à peine quelques jours sont passés que Lilith, adossée à un cocotier proche du rivage, laissant son esprit vagabondée, est touchée par une petite main… une petite main sans corps déposée par les vaguelettes, l’horreur.

 

Patrice Guirao nous entraine dans un étrange récit dans lequel, finalement, l’enquête n’est qu’un prétexte pour évoquer d’autres sujets liés à l’histoire, ancienne ou plus récente, de la Polynésie française. Une histoire de ce coin de France que l’on connait par épisode quand on habite la métropole. Résidant moi-même dans une zone de vacances, j’ai remarqué que les « touristes » viennent passer quelques jours dans leur carte postale, oubliant souvent que des gens vivent dans cet endroit qu’ils considèrent comme un paradis, mais qui a ses propres démons, comme partout ailleurs.

 

❓Êtes-vous déjà aller en Polynésie ?



Début du livre « Les quatre doigts putréfiés pianotaient des murmures de coquillages sur le sable crayeux de la plage. La main échouée avançait doucement vers Lilith, traînant dans son sillage de courts filaments blanchâtres. Le reste du corps devait jouer ailleurs une autre partition. »


Extrait « Les atolls sont des endroits où l’on doit mesurer ses efforts, qui doivent être réservés aux actes essentiels. Le footing n’y a pas vraiment sa place. Nulle part plus que sur ces îlots on ne prend conscience, au quotidien, de la dimension divine du soleil. Il est omniprésent. Sut le corail crayeux pilé et tassé qui recouvre les tronçons de chemin reliant les fare. Sur les plages lisses comme des lacs d’ivoire… Tout lui appartient, même les ombres. »

                                                    

Extrait « Lilith s’étonnait de ces comportements tout en les comprenant. Sans règle, le groupe n’existe pas. Pour qu’il y ait partage, que le plus adroit pêche pour l’impotent, que le voyant guide l’aveugle, il faut des règles, des valeurs des croyances. Si l’un de ces piliers s’effondre, la petite communauté se disloque. La méfiance s’installe et avec elle la peur de l’autre. Et, avec la peur de l’autre, la solitude. Cette solitude qui, sur les atolls, porte en elle toutes les morts. Sur ces terres abandonnées au bon vouloir des forces naturelles, on se garde bien de laisser entrer le ver dans la pomme, et quand il est là, il vaut mieux feindre de ne pas le voir, en espérant qu’il partira de lui-même une fois rassasié. »

 

Extrait « Tounarima, son dernier soupir, c’est pas hier qu’il l’a rendu ! Tu sais ce qu’il m’a dit à ce sujet ? Que c’était que du vent ! Parce qu’un dernier soupir, ça ne sert à rien. Il n’en voulait plus. Et il a ajouté : « Quand tu t’en es débarrassé, après tu peux vivre tranquille. Moi, depuis, je respire. Et je mourrai en respirant. » Il est malin, Tounarima. »

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