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📙 [Chronique] Nathalie Sorokine

De Julie Duchatel, aux éditions Alisio, 2023


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Tout d’abord, un grand merci à Julie Duchatel pour ce très beau cadeau offert grâce à notre contact Instagram. En effet, une jolie surprise qui m’a permis de découvrir ce personnage tout à fait hors norme, Nathalie Sorokine. Une jeune fille au caractère, pour le moins surprenant, qui a côtoyé les esprits les plus brillants des années 40 à 50, dont Simone de Beauvoir. Sous la plume de Julie Duchatel le café de Flore redevient le lieu des discussions des existentialistes et Nathalie, à la fois pertinente mais impertinente, colérique et souvent irrévérencieuse a été une muse pour Beauvoir. Julie Duchatel nous invite à découvrir ce personnage unique, cachée, dans l’œuvre de l’écrivaine philosophe, auteure du Deuxième sexe.


En 1938, Nathalie Sorokine, fille d’un couple d’exilés russes fait sa rentrée au lycée Molière de Paris. Simone de Beauvoir assure les cours de philosophie, éblouie l’ensemble des élèves et subjugue la jeune Nathalie. Celle-ci, très sure d’elle et pour le moins sans gêne, s’immisce petit à petit dans la vie de la belle professeure. A ses côtés, elle découvre la vie culturelle parisienne, les premiers émois, mais sa jalousie maladive la rend souvent extrêmement désagréable. Quelques mois avant l’occupation, sa vie n’est toujours que caprice et désinvolture.


Voici un livre qui donne envie de lire ou relire Simone de Beauvoir, Jean-Paul Sartre ou Albert Camus. En effet, à travers les yeux de l’héroïne de cette passion folle, Julie Duchatel mais aussi en lumière ces grands écrivains, dans une période extrêmement difficile. On sent toutefois que malgré cette admiration, tout à fait compréhensible, Sorokine souffre depuis le début de sa rencontre avec Beauvoir d’une pathologie qui la ronge, l’empêche de s’épanouir et l’enfonce même dans une certaine détresse.

Merci aussi pour la découverte des « French war brides » parties sur le Vulcania, le bateau qui mènera ces jeunes françaises vers leurs époux américains, rencontrés à la Libération.



Début du livre « La sonnerie retentit dans la cour du Lycée Molière, tandis que le gardien, impassible, ouvre avec fracas le portail, réveillant d’un geste le XVIe arrondissement. En quelques minutes, une armée de jeunes filles envahit l’espace et colorise l’établissement de ses jupes raccourcies et des chemisiers pastel aux manches courtes. »



Extrait « Durant le repas, l’homme lui parle de cette collaboration nécessaire à établir entre la France et l’Allemagne mais ses propos sonnent faux. Le mot « collaboration » résonne autrement en elle, comme un sinistre crève-cœur. Même si elle ne s’est jamais sentie française, elle se sent traitre, ce qui est largement pire. Elle n’a pas besoin d’avoir de patrie pour être infidèle. Afin de prendre sa décision, elle a besoin d’une preuve de la sincérité de l’Allemand. »

Extrait « Quand Beauvoir reste silencieuse, qu’elle se mure dans l’inquiétude, Nathalie lui demande : « A quoi pensez-vous ?

- Je pense à la guerre, répond Simone.

- Encore ! Vous ne pourrez donc jamais penser à moi ? » interroge Sorokine.

Intraitable, elle voudrait que Beauvoir l’aime dans sa totalité, que toutes ses pensées lui soient adressées. Elle capable d’être jalouse de tout, même de la guerre. »


Extrait « Elle, qui espérait détester Sartre, se sent à chaque nouvelle rencontre impressionnée par lui. Elle, qui s’attendait à rencontrer un homme prétentieux, encombré par ses idées et son ego, découvre à la place un homme blessé, en colère, incapable de tenir en place et qui cherche à tout prix un sens à son retour à Paris. La Russe qui aime les écorchés ne lui résiste pas. Elle aurait largement préféré qu’il soit bête, au moins, il lui serait possible de ne pas l’aimer. »



Extrait « A la fin de la soirée, Nathalie, toujours directe, regarde le garçon droit dans les yeux et lui dit : « J’aimerais beaucoup vous revoir. » Le garçon, effrayé par cette grande créature intense, lui répond : « Moi non, je ne veux certainement pas m’engager avec vous.

- Alors je vous suivrai, je ne vous lâcherai pas ! lui lance-t-elle.

- Ça ne marche pas comme ça l’amour, riposte Bourla de sa grosse voix.

- Détrompez-vous, s’exclame Sartre en riant, chez Natasha, ça marche exactement comme ça ! » »

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