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📙 [Chronique] Nuit torride en ville

De Trevanian, aux éditions Gallmeister, 2002


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[Coup de cœur] En général, je ne suis pas fan de nouvelles, mais avec Trevanian, je suis conquis. Déjà inconditionnel de cet auteur, « Nuit torride en ville » m’a enthousiasmé par son éclectisme en matière d’émotions, de genres et de styles. Car ce recueil vous fait voyager dans le temps et dans l’espace, de notre époque contemporaine et au moyen-âge, des États-Unis au Pays Basque. Les personnages sont exceptionnels, de charme ou d’humour ou de cynisme ou de bêtise, mais surtout attachants. Trevanian nous propose comme dans un restaurant étoilé, un menu aux saveurs incroyables à déguster sans modération.

 

13 nouvelles s’enchainent dans ce recueil et il est très difficile d’en trouver un fil conducteur sauf le talent du narrateur. En effet, d’un chapitre à l’autre, l’univers change, vous y trouverez un tueur en série, les histoires d’un petit village basque, les aventures de gens du voyage, les déboires d’un écrivain, une légende amérindienne, des chevaliers de la table ronde, les tourments de Ponce Pilate et une comédie de boulevard. Autant satisfaire tous les goûts avec le même génie de la narration.

 

Malheureusement, je n’ai plus qu’un seul ouvrage de ce maître de la littérature à découvrir, « L’été de Katya ». Pourtant, je sais que j’en relirai certains, rien que pour le plaisir du moment passé. Même s’il est connu pour avoir écrit plusieurs romans à succès dans des genres très variés, il a entretenu un certain mystère autour de sa véritable identité pendant de nombreuses années. Pour ma part, sa capacité à maîtriser différents genres littéraires, tout en maintenant un très haut niveau de qualité narrative et stylistique, en a fait un auteur culte.

 

❓Etes-vous amateurs de nouvelles ?



Début du livre « Il n’y avait que trois passagers dans le dernier bus en provenance du centre-ville : un homme, une femme et un clochard. Le jeune homme mince s’était assis à l’écart, au fond, parce que d’instinct il se méfiait des hommes en uniforme, chauffeurs d’autobus compris. »

 

Extrait « Nus autres de Xiberoa sommes considérés comme arriérés et démodés par les Basques du littoral qui vivent dans l’ombre de l’étranger. On signe l’accent de chez nous pour rendre les blagues plus amusantes, et il arrive que des gens viennent d’aussi loin que Paris pour photographier nos lera, ces traîneaux attelés aux cornes des bœufs brun-roux d’Urt et chargés des fougères séchées que nous récoltons à flancs de coteaux pour la litière d’hiver des animaux de ferme. »

 

Extrait « Parlant à travers Vieux, Celle-Qui-Crée-En-Prononçant-Le-Nom-Des-Choses répondit à la question de Coyote.

-          Yeux-pâles haït le Peuple parce qu’il a dans son ventre une soif terrible de posséder ses terres.

-          Posséder des terres ? glouglouta Chien grossière. Mais comment peut-on posséder la terre ?

-          C’est absurde ! persifla Arbre dans un aboiement outré. A-t-on déjà entendu parler de posséder la terre ?

-          On ne peut pas posséder la terre, gronda Serpent. Autant sire qu’on peut posséder l’air, posséder les eaux ou posséder les nuages, pendant que vous y êtes ! On ne peut posséder de telles choses. On peut les apprécier, en faire bon usage, les chanter, mais on ne peut pas les posséder. »

 

Extrait « Une heure plus tôt, le bar battait son plein, avec sa clientèle du genre mercantile des deux sexes, et chacun donnait de la voix en se rendant plus intéressant que la Nature ne l’avait conçu, chacun en quête d’entrejambe dans cette jungle en carton faite de musique, de rires, de gnôle et de plaisanteries univoques qui suscitaient une hilarité bruyante, non parce que les mots étaient bons, mais parce que l’éclat de rire était là pour faire savoir qu’on avait compris la blague et que l’on était dans le coup – quoique dans une modeste mesure. »

 

Extrait « Quoique chacun des vaillants guerriers d’Arthur eût soif d’attirer l’éloge des Hommes pour ses nobles actions et le pardon de Dieu pour ses viles actions en se consacrant à la recherche de la plus sainte des reliques, l’ordre du roi ne rencontra néanmoins aucune précipitation car, que la vérité inavouable soit connue, pas un seul de ces nobles guerriers n’était certain au plus profond de son cœur de savoir ce qu’était exactement un graal… sauf, bien évidemment, qu’il s’agissait d’une chose sainte et d’un objet de quête juste. »

 

Extrait « - Non, je réfute ces inepties sur les coïncidences comme « Moteur du Destin ». Ce n’est qu’une piètre excuse invoquée par les conteurs pour avoir recours à des conventions galvaudées. Comme celle de la fin heureuse, du vieux stratagème de l’erreur d’identité, de la grenouille qui se transforme en prince, alors que dans la vie – dans la vraie vie âpre et sans fard – le prince se révèle le plus souvent être une grenouille, ou plus précisément un crapaud. »

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