top of page

📙 [Chronique] Stella et l’Amérique

De Joseph Incardona, aux éditions Finitude, 2024


🔥🔥🔥🔥🔥

[Coup de cœur] J’ai immédiatement été emporté par cette histoire entre road trip et mythisme. Le côté surnaturel, les secrets d’Etat du Vatican, les tueurs à gages et les personnages excentriques m’ont fait penser à la série du Bourbon Kid. Pourtant, on est là sur un autre niveau de narration et notre relation aux croyances. Joseph Incardona navigue brillamment entre des personnages cyniques et violents et d’autres innocents. Nous interpellant parfois dans le texte, sur la suite de l’histoire, il nous interroge sur notre désir ou la nécessité d’un Happy End.

 

Stella a 19 ans, elle est simple et sincère, un peu naïve. Elle ne pense qu’à donner de l’amour de la façon la plus directe, en faisant l’amour. C’est aussi le moyen de gagner sa vie, dans son camping-car au cœur du camp de forains. Et tout en faisant l’amour, elle guérit les cas les plus désespérés. La rumeur se répand, qu’une prostituée réalise des prodiges. Le monde est-il prêt à vénérer une sainte, mais surtout le Vatican acceptera-t-il que ces miracles s’accomplissent par le péché de chair ?

 

Comme le spécifie la quatrième de couverture, le roman dresse une galerie de personnages étonnants et décalés dont certains croient à cette sainte désarmante d’innocence. Avec un style délibérément poétique et optimiste, il démontre que la vie peut-être belle tout en côtoyant les plus sinistres individus. La lecture de cet auteur est une belle découverte à renouveler rapidement.

 

❓Avez-vous lu d’autres romans de Joseph Incardona ?



Début du livre « Il faut savoir que Stella n’était pas exactement belle, ni très futée non plus. Mais elle était sincère. Et loyale. Et dans une vie, quand on y pense, ça peut suffire pour devenir une sainte. »

 

Extrait « Assis sur la banquette perpendiculaire à la couchette, le père Brown l’examina avec attention. Stella était belle et farouche, pas exactement belle comme on le croit, mais comme on le sait, belle de manière définitive, vous appelant dans les entrailles du désir. Les yeux de Stella, vitrine d’une âme se connectant à la vôtre, un seul regard suffit, et vous êtes appelés, vous êtes l’élu, on l’a dit. Bref, vous êtes dans la merde jusqu’au cou de ce que l’on appelle l’envoûtement. Stella était un peu la Gorgone, sauf que ses cheveux blonds sentaient le shampoing à la lavande et la Malboro light ; et qu’au lieu de vous pétrifier, le simple fait de la contempler vous insufflait un supplément de vie. »

 

Extrait « Dans le grand désordre du monde, qui comprend aussi du bruit, et des odeurs, et des voix qui se superposent pour ne rien dire d’essentiel – ou simplement de drôle ou de valable ou de sensé-, dans ce bordel multiple de contradictions et de redondances, d’actes manqués, de ratages et de défaites, de mains levées au ciel et de sourires confiants, dans cette cacophonie d’humanité émouvante de vanité et de veulerie – parfois capable de générosité, et d’altruisme – dans cette glaise où une musique soudain nous emporte et nous dépose un peu plus loin dans le voyage de l’âme, eh bien dans ce foutoir généralisé où l’on cherche, on se défend et lutte, il y a nécessité, tôt ou tard, de finir cette phrase, exactement où Stella Thibodeaux ne pouvait s’empêcher d’accomplir un miracle. »

 

Extrait « Le corbillard, c’est l’occasion qui avait fait le larron, mis en vente par ce garage à la sortie de Blounstown (2514 habitants). L’intérieur usé et jauni puait la mort et le formol, il avait fallu rouler un bon moment les vitres baissées, mais au moins, une fois qu’on tirait les petits rideaux plissés, il y avait de la place pour y dormir, et éviter ainsi les motels. Et puis qui avait peur de la mort dans cette voiture ? Qui s’en inquiétait, de la sainte ou du curé ? »

Comments


Dernières publications
Tag Cloud
bottom of page