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📙 [Chronique] The Main

De Trevanian, aux éditions Gallmeister, 2020


Roman policier / Roman noir


🔥 🔥 🔥🔥🔥


[Coup de cœur] Ce n’est pas un roman policier que l’on lit mais un roman noir, dont l’enquête est le prétexte à parcourir les un quartier de Montréal, rencontrer ses habitants et vivre ses moments les plus glauques. Trevanian est loin de Shibumi ou de l’Expert, il nous surprend avec un autre de style, comme il l’avait fait avec brio à la lecture d’Incident à twenty miles. Et quand je suis arrivé au bout du roman, j’ai eu l’envie de le relire, une fois encore, mais différemment. Car l’impression reste d’être passé trop vite sur cette tranche de vie.


Claude LaPointe est un flic à l’ancienne. Dans les années 70, le monde est en pleine révolution, la police se modernise et adopte de nouvelles procédures plus en adéquation avec les libertés individuelles. Claude LaPointe aime « son quartier », le boulevard Saint-Laurent au cœur de Montréal, appelé aussi La « Main ». Il connait chaque recoin, la plupart des habitants, ceux qui ont une vie en marge de la légalité. Il est craint pour sa droiture et son intransigeance mais aussi respecté pour son humanité. L’assassinant d’un inconnu va le conduire au bout de ses questionnements.


Il ressort de Trevanian et de ce roman en particulier, une grande force narrative. Le roman n’est pas noir dans ce qu’il met en avant mais dans la façon dont l’auteur l’exprime en creux. Trevanian aime son quartier, ses habitants, sa force vitale mais il en ressort à travers tout le positif, un négatif plus profond, et plus désespérant que l’expression même de la noirceur. Cet auteur américain, fort mystérieux, ne me laisse qu’un dernier livre à livre de son œuvre.


❓Connaissez-vous cet écrivain assez mystérieux ?


Début du livre « La nuit tomba sur la Main et les boutiques ferment une à une. Les éventaires disparaissent des trottoirs, les grillent descendent en ferraillant devant les vitrines. Une ou deux lampes restent allumées pour dissuader d’éventuels cambrioleurs. Les tiroirs caisses sont laissés entrouverts afin que les voleurs ne les fracturent pas inutilement. »



Extrait « En passant devant la ruelle étroite qui court le long de la banque de Nova Scotia, il sent une poussée d’adrénaline au creux de l’estomac. En dépit des années, ses nerfs, tout à fait inconsciemment, s’emballent chaque fois qu’il passe à cet endroit. C’est dans cette ruelle qu’il a été blessé. C’est là qu’il est resté aux portes de la mort, qu’il attendu la mort. Et lorsqu’un homme a perdu le sentiment de son immortalité, il ne le retrouve jamais. »

Extrait « LaPointe se lève et referme son pardessus, pendant que Guttmann reste assis et qu’il a l’impression… non d’avoir tort au sujet de l’affaire Scheer, mais qu’il n’est pas dans le coup, qu’il est dépassé.

- Qu’est-ce qui ne va pas ? demande LaPointe.

- Oh… je pensais à mon rendez-vous de ce soir. Ça m’ennuie de le remettre parce que c’est la première fois que nous devions sortir ensemble.

- Bah ! elle comprendra. T’as qu’à inventer un mensonge quelconque… Tiens, dis-lui que t’es flic, par exemple. »



Extrait « - Assis tout droit ! ordonne LaPointe. Et gardez les mains sous les fesses ! Je veux entendre les phalanges craquer !

C’est un truc que lui a enseigné un vieux policier, mort aujourd’hui. Quand un homme est assis sur ses mains, non seulement tout geste soudain lui est interdit, mais il se sent aussitôt embarrassé, humilié, ce qui lui donne un sentiment de défaite et la passivité voulue. C’est une astuce particulièrement utile lorsque vous êtes désavantagé par le nombre. »


Extrait « LaPointe examine le cercle des clients : deux jeunes gens qui n’ont rien de mieux à faire ; une femme à l’air viril en manteau de drap, assisse au pied de la danseuse, et qui la fixe, fascinée, en se passant un doigt sur les lèvres n’est pas dans le coupes ; deux militaires déjà un peu ivres ; un vieux Grec qui examine tristement le contenu de son verre ; un quinquagénaire au complet strict, à la cravate classique, sont porte-documents posé sur le bar, guettant l’aller-retour des pouces dans le string, son col dur teinté de vert par la lumière ultra-violette. Somme toute, c’est le classique amalgame d’étrangers et d’épaves qu’on rencontre dans ce genre de bar en début de soirée ou l’après-midi dans les cinémas porno. »

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