đ [Chronique] Tout le bleu du ciel
De MĂ©lissa Da Costa, aux Ă©ditions Livre de Poche, 2020
Roman
đ„ đ„ đ„đ„đ„
Je ne pouvais illustrer cette lecture que par une photo de Gruissan, ce village oĂč jâhabite fait partie du voyage de Joanne et Emile. Moi aussi, je me suis arrĂȘtĂ© Ă Gruissan pour y rester, dĂ©sormais, mon voyage sâest arrĂȘtĂ© dans ce village de pĂȘcheurs. Ce livre prĂȘtĂ© par une amie mâa transportĂ© bien au-delĂ des lieux traversĂ©s le fameux camping-car, câest un voyage fort en Ă©motions qui interroge sur le sens que lâon veut donner Ă sa vie et sa capacitĂ© Ă se libĂ©rer des tensions imposĂ©e par notre quotidien. MĂ©lissa Da Costa mâa donnĂ© envie de relire lâAlchimiste de Paulo Coelho.
Emile est un jeune homme qui vit une vie tout Ă fait « normale » avec sa famille, ses amis et une rupture un peu compliquĂ©e sentimentalement. Or quelques troubles de santĂ© lui font consulter un spĂ©cialiste qui lui dĂ©tecte un Alzheimer prĂ©coce. La sentence est sans appel, il lui reste au plus deux ans Ă vivre. Il dĂ©cide de remettre en cause tous les schĂ©mas conventionnels et de partir sur les routes avec une ou un inconnu, en lançant une petite annonce. Seule Joanne y rĂ©pondra pour lâaccompagner dans cet ultime voyage.
Il faut avouer que la fin (que je pressentais) mâa beaucoup Ă©mu, mĂȘme si je ne suis pas fan de ce genre de littĂ©rature « Feel Good », mais lâĂ©criture de MĂ©lissa Da Costa est trĂšs plaisante. La prĂ©sence de nombreux personnages secondaires bienveillants est aussi un signe que notre monde est surtout constituĂ© de personnes positives plutĂŽt que nĂ©gatives. Malheureusement, lâactualitĂ©, les circonstances, les Ă©vĂ©nements font ressortir les signes malveillants. Tout le bleu du ciel, malgrĂ© un thĂšme trĂšs lourd, est fonciĂšrement rĂ©confortant.
âUn bon roman feelgood Ă me conseiller ?
Début du livre « Petitesannonces.fr
Sujet : Recherche compagnon(ne) de voyage pour ultime escapade.
Auteur : Emile26
Date : 29 juin 01 : 02
Message : Jeune homme de 26 ans, condamnĂ© Ă Alzheimer prĂ©coce, souhaite prendre le large pour un ultime voyage. Recherche compagnon(ne) dâaventure pour partager avec moi ce dernier pĂ©riple. . »
Extrait « « Tu as raison, câest sympa de marcher seul, confie-t-il lorsquâelle le rejoint.
- Oui.
- Câest⊠ça fait remonter plein de choses. »
Il se demande si câest pareil pour elle, si elle entend la voix de LĂ©on quand elle marche. Il la voit hocher la tĂȘte son visage vers lui. Elle prononce cette phrase Ă©trange dâune voix Ă©trange : « Le vĂ©ritable voyage de dĂ©couverte ne consiste pas Ă chercher de nouveaux paysages, mais Ă avoir de nouveaux yeux. » »
Extrait « « CâĂ©tait un jour de fin du monde, ce jour oĂč on est arrivĂ©s Ă Luz-Saint-Sauveur⊠Le ciel Ă©tait bas et sombre. Il a tonnĂ© toute la nuit. Tu avais lâair heureux. Tu as passĂ© des heures collĂ© Ă moustiquaire, Ă regarder les Ă©clairs. »
Il lui sourit avec reconnaissance. Elle sâimagine pas le bien que cela lui fait.
« Et toi ? demande Emile.
- Quoi, moi ?
- Tu devais ĂȘtre effrayĂ©e. »
Elle hausse les Ă©paules avec son petit visage inexpressif, qui lâest de moins en moins.
« Pas tant que ça. » »
Extrait « Il se force Ă se lever de son banc, malgrĂ© la fatigue et les coups de soleil, avec la volontĂ© de vite regagner leur maisonnette mais lorsquâil se retrouve debout, il est incapable de bouger. Il se sent dĂ©boussolĂ©. Est-ce la chaleur ? Est-ce quâil a fait une insolation ? Il ne sait plus oĂč aller. Il ne sait plus quelle direction prendre. Putain, ne dĂ©conne pas. Câest un chemin quâil prend tous les jours depuis plus dâun mois. Pourtant aujourdâhui, il se trouve bloquĂ© et indĂ©cis. Il ne sait plus quelle ruelle il doit emprunter. Cette fois câest la fin mon vieux⊠Tu es foutu. Tout va dĂ©railler. Il essaie encore de se dire que câest Ă cause du soleil, quâil doit faire une insolation. Pourtant il sait que câest faux. Les mĂ©decins lâont prĂ©venu. »
Extrait « 29 octobre, 02h07
Assis Ă la table du camping-car, sur la banquette.
Gruissan. A la lueur de la bougie.
Je ne crois pas avoir Ă©tĂ© aussi heureux que depuis que je suis avec Joanne, au bord de la mer. Câest un bonheur tellement simple, tellement banal, et pourtant je nâai jamais Ă©tĂ© aussi serein. MĂȘme si je vais mourir bientĂŽt, mĂȘme si je vais mâĂ©teindre sans souvenir. Je crois quâelle a finalement rĂ©ussi Ă mâapaiser. Avec sa mĂ©ditation Ă la con, ou juste avec son calme, sa façon Ă©trange et si douce dâaborder la vie. »
Extrait « Joanne attend que la peinture sĂšche pour remettre la toile dans son sac Ă dos. Elle attend le lendemain matin. Elle lâenroule soigneusement dans un vĂȘtement avant de la glisser dans son sac. Elle ne voudrait pas quâelle sâabĂźme⊠DerriĂšre la dame au chapeau blanc et Ă la robe blanche Ă pois rouges, elle a peint la clairiĂšre dans laquelle ils se trouvent. Lâherbe verte. Les rochers. Le chemin caillouteux au loin. Les mĂ©lĂšzes. Les dents dâAnsabĂšre qui se dĂ©coupent sur le ciel bleu chargĂ© de petits nuages ronds. Cela donne une peinture Ă©trange et un peu dĂ©calĂ©e. On se demande ce que fait la dame dans cette tenue de ballerine, perdue au milieu de la montagne. »
Comments