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Le banquet des affamés

De Didier Daeninckx, aux éditions Folio, 2012


Le hasard a voulu que je rencontre Didier Daeninckx en 2019 au Salon du livre de Narbonne, que j’achète ce roman sans trop savoir de quoi il parlait et que je lise exactement dans la période des 150 ans de la Commune de Paris. Drôle de coïncidence qui m’a fait découvrir un homme au parcours des plus rocambolesques, Maxime Lisbonne. Le Banquet des Affamés est l’histoire de cet homme, haut en couleur, narré par l’écriture toute aussi haute en couleur de Daeninckx. Sous sa plume la vie de Lisbonne devient un véritable roman d’aventures qui nous entraîne de France en Afrique jusqu’en Nouvelle-Calédonie.


En 1905, L’Humanité et le Figaro rendirent hommage à cette figure de la Commune de Paris.

Pour l’Humanité « Ce fut, certes, un fantaisiste compagnon, que Maxime Lisbonne, mais un vaillant et aussi un brave homme », pour le Figaro « Depuis plusieurs années l’ancien colonel de la Commune avait disparu. Il est mort à soixante-sept ans, oublié, pauvre. » Ces deux fins d’hommage montrent que cet homme fut adulé par certains et méprisé par les autres. Sa vie est forcément à découvrir, comme celle des hommes au caractère bien trempé.


Ce roman sur Maxime Lisbonne est un livre sur les combats sociaux. Ces combats livrés pendant et après la Commune de Paris,malgré les massacres perpétrés par Napoléon III. On y croise des grandes figures de l’époque comme la fulgurante Louise Michel, et d’autres à l’exemple d’Alexandre Dumas fils que Lisbonne maltraite. De petites histoires dans la grande histoire, traversée par les Prussiens et le Baron Hausmann, font de ce livre un beau roman historique, merci Didier Daeninckx.

Maxime Lisbonne Engagé dans la marine, il participe à la Guerre de Crimée puis il devient chasseur à pied et ensuite zouave. Son engagement terminé, il se lance dans le théâtre et devient directeur de la salle les Folies Saint-Antoine, mais il fait faillite en 1868. Il devient alors agent d'assurance.


Pendant le siège de Paris par les Prussiens, il est élu capitaine du 24e bataillon de la Garde nationale, avec lequel il participe au combat de Buzenval en janvier 1871. Dès le 14 mars, comme délégué du 10e arrondissement, il est membre du comité central de la Garde nationale. Le 24 mars 1871, avec Eugène Protot et Paul Antoine Brunel, il dirige la manifestation contre la mairie du 1er arrondissement. Le 3 avril, il est élu chef de la Xe légion de la Garde nationale. Le 1er mai, il est nommé lieutenant-colonel et prend le commandement des fortifications parisiennes entre le Point-du-Jour et la porte de Versailles. Devenu colonel, il porte un costume étrange : grandes bottes à retroussis, tunique à large parements rouges, éperons à l'orientale, laissant trainer son sabre sur le pavé. Pendant la Semaine sanglante, il organise la défense du Panthéon et du Château-d'Eau. Le 26 mai, sur la barricade de la rue Amelot, il est blessé à la cuisse et transporté dans une voiture à bras à l'ambulance de Saint-Mandé, où il est amputé. Arrêté, il passe le 4 décembre 1871 devant le conseil de guerre, qui le condamne à la peine de mort ; mais un second conseil, en juin 1872, commue la sentence en travaux forcés en Nouvelle-Calédonie. Il purge sa peine sur l'île de Nou.


Après l'amnistie de 1880, il revient en France et reprend ses activités théâtrales aux Bouffes du Nord. Il se lance dans le journalisme avec L'Ami du peuple, où il prône la révolution sociale. Il ouvre différents cabarets, La Taverne du Bagne, Le Casino des Concierges, Le Ministère des Contributions directes et Le Concert Lisbonne (ancien Divan japonais). Situé boulevard de Clichy à Paris, La Taverne du Bagne, dont les portes sont des grilles et où les garçons sont déguisés en bagnards traînant la chaîne, est « représentative du Paris des cabarets » et « fréquentée par les anciens communards comme par la bonne société parisienne ».


Ruiné, il termine sa vie comme débitant de tabac à La Ferté-Alais, où il meurt en 1905.



La Commune de Paris est une période insurrectionnelle de l'histoire de Paris qui dura 72 jours, du 18 mars 1871 à la « Semaine sanglante » du 21 au 28 mai 1871. Cette insurrection refusa de reconnaître le gouvernement issu de l'Assemblée nationale, qui venait d'être élue au suffrage universel masculin, et choisit d'ébaucher pour la ville une organisation de type libertaire, basée sur la démocratie directe, qui donnera naissance au communalisme.


La Commune est à la fois une réaction à la défaite française de la guerre franco-prussienne de 1870 et au siège de Paris, et une manifestation de l'opposition entre le Paris républicain favorable à la démocratie directe, et une Assemblée nationale à majorité monarchiste acquise au régime représentatif. Cette insurrection et la violente répression qu'elle subit eurent un retentissement international important, notamment au sein du mouvement ouvrier et des différents mouvements révolutionnaires naissants. La Commune est de ce fait encore aujourd'hui une référence historique importante pour les mouvements communistes et libertaires et plus largement pour les mouvements de gauche.



Début du livre « Quand le tribunal militaire m’a condamné à mort pour la première fois, je me suis dit que c’était là le lot des vaincus. La deuxième condamnation à la peine capitale est intervenue alors qu’un chirurgien m’annonçait qu’il allait certainement sauver ma jambe qu’un éclat d’obus avait déchiquetée sur la barricade de la place du Château-d’Eau. Il me serait possible de me tenir debout devant le peloton d’exécution. Il va sans dire que cette attention m’est allée droit au cœur. Mais à l’énoncé de la troisième décision me vouant au poteau, j’ai trouvé cela injuste et j’ai pris la plume. »


Extrait « La foule était massée sur le quai opposé. Certains venaient pour le spectacle, la charogne des voyeurs, mais des amis prévenus par on ne sait quel moyen s’étaient mêlés à ces ignobles badauds. Plusieurs fois le cri de « Vive la Commune » avait fusé. Je l’avais repris, appuyé sur mes béquilles, m’attirant le crachat d’un gardien. »


Extrait « Peu après, j’avais reçu le pli d’un notaire. Je m’étais retrouvé dans une étude sombre au milieu de gens habillés en noir. C’était ce qui me restait de famille, de lointains cousins que je ne connaissais pas. Quand le clerc a lu le passage du testament où était indiquée la somme qui m’était léguée, j’ai senti peser sur moi les regards soupçonneux de ceux qui avaient l’impression d’être floués, spoliés, par la tendresse qu’elle me portait. Le prix leur en semblait exorbitant. »

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