le cerbère blanc
De Pierre Raufast aux éditions Stock, 2020
Encore un très beau roman de Pierre Raufast, même si sa construction est beaucoup plus classique que ses précédents ouvrages. Et en parlant de classique, on entre de plain-pied dans une tragédie grecque, les éléments se mettent en place pour aboutir, inexorablement, à une situation dramatique que seuls les dieux pourront dénouer. Et que dire de ce fameux cerbère nous renvoie, lui aussi, régulièrement vers l’Antiquité. Pourtant l’action se passe, essentiellement à Chantebrie, curieuse vallée, dans laquelle les histoires les plus incroyables prennent vie.
Mathieu et Amandine vivent une enfance heureuse dans la vallée de Chantebrie. Leurs parents respectifs se connaissent si bien que les enfants vivent comme de faux jumeaux des moments de complicités. Pourtant, ce bonheur va être terrassé par la mort accidentelle du père et de la mère de Mathieu. Depuis ce jour, Mathieu a l’obsession de vaincre ce qui est inexorable pour tout être vivant, la mort. Il quitte alors Chantebrie, laissant derrière lui son amour, sa terre, ses souvenirs et sa parole.
Pierre Raufast joue sur les mythes de l’éternelle jeunesse, de l’homme qui veut vaincre la mort et du retour auprès des êtres aimés. Ce qui tourmentait les auteurs de la Grèce antique nous interpelle encore, avec d’autant plus d’acuité, que nonobstant les progrès de la science, la mort parvient toujours à ses fins. Malgré la grande qualité de ce livre, j’aurais beaucoup de plaisir à retrouver les romans plein d’humour et de surprises dont Pierre Raufast a le secret. J’ai déjà dans ma PAL « Les embrouillaminis ».
Cerbère Dans la mythologie grecque, Cerbère (en grec ancien Κέρϐερος / Kérberos) est le chien polycéphale (généralement à trois têtes, mais aussi cinquante selon Hésiode ou cent chez Horace) gardant l'entrée des Enfers. Il empêche les morts de s'échapper de l'antre d'Hadès et les vivants de venir récupérer certains morts.
Cerbère est notamment connu pour avoir été capturé par Héraclès lors de ses douze travaux.
On retrouve Cerbère dans de nombreuses œuvres de la littérature grecque et romaine antique, ainsi que dans l'art et l'architecture, aussi bien moderne qu'ancienne.
Edward Hopper, Chop suey La scène représente deux femmes à une table dans un restaurant avec un autre couple en arrière-plan. Les seuls éléments particulièrement détaillés sont le visage peint de la femme, le manteau suspendu au-dessus d'elle, le dos de son compagnon [au spectateur], les traits du couple en arrière-plan, la théière sur la table, le panneau inférieur masqué de la fenêtre, et l'enseigne du restaurant à l'extérieur. Autant de caractéristiques qui apporteraient un élément sensoriel (outre la vue) à la mémoire peinte : le bourdonnement de la lumière extérieure, les voix des personnes en arrière-plan, la texture du pelage, le goût du thé et l'odeur de la fumée de cigarette (tenue par l'homme) et la lumière brouillée de la fenêtre masquée. L'œuvre d'Edward Hopper est connue pour ses scènes réalistes qui touchent les thèmes de l'isolement et de l'auto-être plutôt qu'un contexte narratif.
Il a souvent décrit son art comme une « transcription de ses impressions les plus intimes de la nature », ce qui signifie qu'il a lié le processus de la peinture à celui de la mémoire. Cette idée pourrait en outre être décrite d'une autre manière, comme lorsque, par exemple, vous tirez quelque chose d'une mémoire personnelle, certains détails peuvent être mémorisés mais tout ce qui se trouve en dehors de l'objectif principal est un arrière-plan vide. Chop Suey capture ce concept de mémoire, faisant en sorte que le spectateur se concentre sur des éléments particuliers de l'iconographie sensorielle tout en décrivant un thème d'isolement dû à l'être soi.
Début du livre « Nos famille étaient amies dans ce village de la vallée de Chantebrie. Nos parents avaient grandi ensemble dans ce cocon montagnard et se considéraient plus cousins qu’autre chose. Aussi personne ne fut surpris de nous voir naître à un jour d’intervalle au mois de juin. Deux Gémeaux à défaut d’être jumeaux. »
Extrait « Le lendemain, elle m’offrit un nouveau poster. C’était une autre peinture de Hopper : Chop Suey. « Ça se passe toujours dans un café, mais la jeune fille n’est plus seule. » me murmura-t-elle. « J’aimerais bien que tu remplaces Automat par celui-ci. » Elle me demanda cela avec une infinie douceur dans le regard. »
Extrait « Je lui retire son alliance et la pose délicatement sous sa langue, obole au passeur du Styx. Puis je pleure une heure, une journée, une année, un siècle. Je m’isole du monde, je hurle ma colère et beugle ma peine. Plus rien n’existe, j’ai tout raté. Le monde n’est qu’une vaste plaisanterie dans laquelle quelques dieux hilares se jouent de nous. »
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