📙 [𝓒𝓱𝓻𝓸𝓷𝓲𝓺𝓾𝒆] On m’appelle Demon Copperhead
- jmgruissan
- 18 oct.
- 4 min de lecture
De Barbara Kingsolver, aux éditions Albin Michel, 2022
🔥🔥🔥🔥
Un livre fort, dense et riche. Voici les premières impressions qui me viennent en tournant la dernière page. Barbara Kingsolver ne propose pas seulement un roman sur un jeune américain maltraité par la vie, c’est essentiellement une réflexion profonde sur l’Amérique au début des années 2000, la pauvreté, la consommation de drogues et d’alcool. On suit l’enfance et l’adolescence de Demon Coppehead, très rapidement orphelin et balloté entre les familles d’accueil. On l’accompagne dans son calvaire malgré son intelligence, ses capacités physiques, ses talents et sa volonté. Ce n’est pas un long fleuve tranquille pour lui, et on se prend rapidement à espérer que sa vie prenne un cour meilleur et qu’il s’épanouisse. On en rêve pendant 600 pages.
Demon Copperhead nait dans un mobil home perdu dans un comté, perdu lui aussi dans l’Amérique profonde. Enfant d’une mère toxicomane et d’un père disparu trop vite, il va connaitre les douleurs inhérentes à certaines familles d’accueil qui ne recherchent qu’un revenu complémentaire ou qu’une main d’œuvre gratuite en hébergeant un enfant sorti des listes des services sociaux. Comme beaucoup de ses camarades, il finit par tuer l’ennui avec la drogue, l’oxy. Par ailleurs, il acquiert aussi des valeurs de bienveillance, de fidélité, de travail mais sauront-elles le sauver de toutes les influences négatives qui le trompent et le menacent.
Barbara Kingsolver est « reconnaissante à Charles Dickens d’avoir écrit David Copperfield, critique fervente de la pauvreté systémique et de ses effets dévastateurs sur les enfants de la société de son temps. Ces problèmes n’ont pas disparu. En adaptant son roman à ma propre région et ma propre époque, en travaillant des années durant par son indignation, son inventivité et son empathie, j’en suis venue à le considérer comme un génie ami. »
Un livre profondément engagé socialement, Barbara Kingsolver y dénonce les profondes inégalités de l’Amérique dont certains enfants sont frappés par l’ignorance, la violence et les addictions. En s’inspirant de Charles Dickens, elle démontre que les inégalités sociales n’ont pas été, loin de là, réduites par rapport à l’époque de David Copperfield. Par ailleurs, elle insiste sur le fait que la culture et l’art sont des moyens de s’extraire de cette reproduction sociale. Le jeune Demon Copperhead fait preuve d’une résilience salvatrice face aux épreuves de la vie, une note d’espoir.
❓ Avez-vous lu David Copperfield de Charles Dickens dont ce roman est largement inspiré ?

𝓓𝒆́𝓫𝓾𝓽 𝓭𝓾 𝓵𝓲𝓿𝓻𝒆 « Déjà, je me suis mis au monde tout seul. Ils étaient trois ou quatre à assister à l’événement, et ils m’ont toujours accordé une chose : c’est qui ai dû me taper le plus dur, vu que ma mère était, disons, hors du coup. »

𝓔𝔁𝓽𝓻𝓪𝓲𝓽 « Des enfants, des choix. Ils étaient déjà pourris, les matériaux avec lesquels on devait construire notre vie. Notre seul repère, c’était un garçon plus âgé qui n’avait lui-même jamais connu la stabilité et qui essayait de nous rassurer. On avait la lune à la fenêtre pour nous sourire un instant et nous dire que le monde nous appartenait. Parce que nos parents s’étaient tirés quelque part et avaient tout laissé entre nos mains. »

𝓔𝔁𝓽𝓻𝓪𝓲𝓽 « Morale de l’histoire, maman disait toujours que même morte on la trouverait jamais dans une église. Finalement, elle aura perdu toutes les batailles car la voilà à l’église dans un cercueil blanc de chez Walmart, l’autre endroit qu’elle détestait le plus. »
𝓔𝔁𝓽𝓻𝓪𝓲𝓽 « Le fil tirait fort avec le vent mais je l’ai ramené vers Mr Dick et je lui ai mis dans la main. « Tiens bon », j’ai dit, et je me suis laissé tomber par terre, haletant comme un chien. Il était silencieux, tenant le cerf-volant de toutes ses forces. Fallait le voir. Les yeux levés, le corps rattaché par un long fil au grand ciel d’orage, tout entier là-haut avec ses mots à lui, parlant à qui voulait bien l’entendre. Je n’ai jamais rien vu de pareil. Pas un seul de ses os n’avait jamais été enfermé dans un sac de grain. Cet homme était un géant. »
𝓔𝔁𝓽𝓻𝓪𝓲𝓽 « Par rapport à avant. J’ai dit que peut-être la différence était qu’on voyait tout ce qu’on avait pas. Ceux dans le monde qui étaient plus riches que nous faisaient toutes sortes de conneries et s’en tiraient comme ça. Ça te fout les boules. Ça te perturbe. »
𝓔𝔁𝓽𝓻𝓪𝓲𝓽 « Si n’importe qui d’autre m’avait souhaité être heureux, j’aurais pu me faire avoir. Sauf avec maman peut-être, tant que je ne me mettais pas en travers de ses petites combines. C’est ça que veulent les gens en vérité, te faire entrer dans leurs petites combines. Mais Angus, pas du tout. Angus était une putain de merveille. »
𝓔𝔁𝓽𝓻𝓪𝓲𝓽 « « Tout ce que tu aimes chez elle, t’as la chance de vivre avec. Et le reste, tu vis avec aussi. » Elle était un genre de Maître Yoda. Ça faisait probablement du bien de lui parler, même si ça changeait rien. »
𝓔𝔁𝓽𝓻𝓪𝓲𝓽 « Le corps bien coordonné qui va exécuter sa plus longue course, le centre de gravité donné qui chute automatiquement, les bras qui se referment, les genoux à moitié repliés, mon Dieu, le terrible beauté de ce spectacle. Puis il a perdu le contrôle. S’il avait roulé ses membres en boule il aurait pu s’en tirer, mais la chair et les os cascadaient sur cette pente de rocher en rocher, peut-être une branche pour ralentir la chute, ça aurait été terrible à voit même si ça aurait pu marcher, mais à la fin c’est la fierté qui a décidé de son sort. Il s’est déployé et a pris son élan, piqué tête la première, bras ouverts, et a visé l’eau, mais il a raté son coup. Le choc n’a pas été bien différent de celui d’une pastèque s’écrasant sur un trottoir. »



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