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Santa Muerte

De Gabino Iglesias, aux éditions Sonatine, 2015

Gabino Iglesias nous plonge, sans préavis, dans un univers que Tarentino ne pourrait renier. Violence extrême, dialogues percutants dans une ambiance déjantée. Donc un coup de cœur pour ce roman relativement court mais très dense en émotions. Pourtant, en peu de pages, Iglésias arrive aussi montrer la souffrance et la précarité des immigrés clandestins latinos aux USA. Une réalité, certes mondiale, pour tous les migrants, mais qui interroge sur les inégalités sociales de nos sociétés et sur nos devoirs envers les plus démunis. Gabino Iglesias, portoricain, et culturiste comme le montre la photo de couverture, touche toutes les facettes de nos vies.


Fernando est un immigré clandestin mexicain, il vit à Austin en surveillant l’entrée d’un bar de nuit et en « dealant » pour un patron de la drogue local. Malgré sa situation hors la loi, sa vie se déroule sans problème particulier, jusqu’au jour où il est enlevé en pleine rue. Les kidnappeurs sont des membres d’une mara particulièrement violents, tatoués au possible et n’ayant aucune pitié. Assistant à la décapitation d’un de ses « collègues » de travail, Fernando sait que sa vie va être bouleversée et que des forces obscures sont à l’œuvre.


Comme l’indique la quatrième de couverture, Fernando est un anti-héros poussé par les événements et les circonstances à faire des choses hors du commun. Un malfrat, toujours la peur au ventre, qui côtoie malgré lui des membres de la Mara Salvatrucha, des tueurs à gages, des exilés et surtout la Santa Muerte, symbole d’un mysticisme omniprésent dans les tatouages, les figurines et les prières. Un cocktail détonnant.

Les Maras (ou marabuntas) sont des gangs armés, principalement impliqués dans des affaires de transferts de stupéfiants qui s'étendent à toutes les formes d'activités illicites. Ils sont regroupés en structures plus importantes de type mafieux. Leurs membres, les mareros, sont originaires des pays d'Amérique latine et d'Amérique centrale comme le Salvador, le Honduras, le Guatemala et le Nicaragua. Ils sont particulièrement actifs dans les pays d'Amérique centrale (100 000) et aux États-Unis (30 000)


Ces gangs ont été formés dans les années 1980 par des immigrés clandestins venant du Salvador, du Honduras ou encore du Guatemala qui fuyaient des conditions de vie difficiles (exclusion économique et sociale forte) voire dangereuses (guerres civiles et dictatures). Ces migrants rencontrent aux États-Unis un contexte social difficile, étant généralement relégués vers les quartiers marginalisés et connaissent le chômage. D'abord fondées aux États-Unis, les maras, dans un deuxième temps, se sont implantés dans leurs pays d'origine, notamment à la suite d'expulsions massives des États-Unis des migrants venus d’Amérique centrale.


Après la guerre civile au Salvador en 1992, les États-Unis entamèrent des procédures pour rapatrier les Salvadoriens. Parmi ces rapatriés se trouvaient des membres du gang Mara Salvatrucha, de Los Angeles. Beaucoup continuèrent leurs activités illicites de retour au Salvador, enracinant ainsi les maras en Amérique centrale sur un terreau fertile : la pauvreté et un passé récent de conflits armés. Les rapatriés recrutèrent toujours plus de membres, incluant des jeunes qui immigrèrent à leur tour illégalement aux États-Unis.



Début du livre « Ils m’ont fracassé le crâne par derrière, ces enfoirés. Ils s’attendaient sûrement à ce que je m’écroule comme une masse, mais si le coup était puissant, il manquait de précision. On ne peut pas réussir un K-O chaque fois. Certaines personnes ont la tête très dure. Et à cause de ce putain d’iPod qui m’avait empêché de les entendre arriver, je savais désormais que c’était mon cas. »


Extrait « Quand tu traverses la frontière, tu espères trouver un bon boulot, gagner de l’argent et rencontrer une fille aussi douce que belle. Le rêve américain. Mais c’est des conneries, tout ça. Le rêve américain est aussi factice que le steak dans ton burger à un dollar et que les rires préenregistrés des sitcoms. Et pour toi, c’est encore pire. Tu n’as pas de diplôme, tu n’as pas de qualifications, tu n’as pas d’amis, tu n’as rien. Tu es un problème. Un sans-papiers de plus. Un bouffeur de haricots. Un clando. Un sujet de blagues. Tu es une question sur laquelle débattent les hommes politiques blancs dans le confort de leurs bureaux. »


Extrait « Je me suis rappelé la fois où j’avais accompagné Consuelo ici en voiture. Elle voulait savoir si quelqu’un avait tourmenté sa sœur avant sa mort et elle s’inquiétait de son propre état de santé, car elle se sentait de plus en plus fatiguée. Je lui avais demandé pourquoi elle avait besoin de ce type alors qu’elle-même était capable de voir par-delà le voile.

« Voir les autres, c’est facile Nando, par contre, peu importe le miroir, ton reflet ne sera jamais fidèle à la réalité », m’avait-elle répondu. »


Extrait « - Putain, mec, t’es soit le gars le plus courageux que je connaisse, soit le plus con, a-t-il commenté en enfilant le gilet avant de remettre sa chemise par-dessus.

Je savais malheureusement très bien quelle supposition était la bonne. »

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